La poésie : poésie lyrique et poésie amoureuse

Publié par C. Bacon

Sur cette page, je vous présente tout d'abord un cours sur la poésie lyrique, un lien vers mon article sur la versification, puis quelques très beaux poèmes d'amour de Paul Eluard et enfin une sélection de textes du XIXe siècle.

 

 

La poésie lyrique

 

1. Origine

A l’origine, le mot lyrique vient du mot lyre, l’instrument de musique dont s’accompagnait le poète grec et notamment, dans la mythologie grecque, le musicien et poète Orphée.

 

2. Définition

L’expression poésie lyrique désigne des textes où la musicalité tient une place importante et plus particulièrement des poèmes dans lesquels le poète exprime ses sentiments personnels, intimes : il peut s’agir de l’amour, de la nostalgie, de la solitude, des angoisses liées à la condition humaine (la fuite du temps, la mort) ou des liens avec la nature. Il ne s’agit pas seulement d’exprimer ses propres sentiments mais de renvoyer aux sentiments éprouvés par tous.

 

3. La poésie lyrique française à travers les âges

Au Moyen Âge, les troubadours célèbrent l’amour dans leurs chansons ; des poètes comme Rutebeuf (XIIIe) et François Villon (XVe) traduisent leur malheur ou l’angoisse de la mort.

A la Renaissance (XVIe siècle), Louise Labé, Pierre de Ronsard et Joachim du Bellay évoquent leurs amours, la fuite du temps ou la nostalgie du pays natal dans leurs sonnets ou odes.

Au XIXe siècle, de nombreux poètes appartenant notamment aux mouvements romantiques (Victor Hugo, Alphonse de Lamartine, Alfred de Musset) ou symbolistes (Charles Baudelaire, Paul Verlaine, Arthur Rimbaud) expriment leurs sentiments.

Au XXe siècle, Paul Eluard et Louis Aragon célèbrent l’amour dans des textes en vers libres et souvent sans ponctuation. De nombreux textes de chansons peuvent également être rattachés à la poésie lyrique (Jean Ferrat, Léo Ferré, Jacques Brel, Serge Gainsbourg, Barbara…).

 

4. Les caractéristiques de l’écriture lyrique

Puisqu’elle traduit des sentiments personnels, la poésie lyrique:

- est souvent écrite à la première personne

- utilise le vocabulaire des sentiments et des sensations

- emploie une ponctuation forte pour traduire les émotions du poète ( ? ! …)

- utilise de nombreuses figures de style (comparaisons, métaphores, anaphores, personnification, hyperbole…)

- joue sur le rythme et la musicalité du texte grâce aux procédés de versification (rimes, allitérations, assonances…)

 

L’élégie est une forme de la poésie lyrique qui constitue une sorte de plainte qui évoque une souffrance, qu’il s’agisse de l’évocation de la mort, d’une absence ou encore d’une souffrance amoureuse.

 

Le registre pathétique est souvent utilisé dans la poésie lyrique : il s’agit de susciter chez le lecteur une émotion violente, douloureuse ; il utilise le vocabulaire de la souffrance, des sentiments violents et des images fortes (comparaisons, métaphores, hyperboles).

 

Pour ceux qui ont besoin d'une mise au point concernant la versification, je les invite à consulter  :

http://cbaconlettres.over-blog.com/article-cours-sur-la-versification-107029280.html

 

 

 

La poésie lyrique au XXe siècle : Paul Eluard, poèmes d'amour et de désespoir

Paul Eluard épouse Gala en 1917 ; or en 1926 celle-ci rencontre Salvador Dali dont elle sera la muse (pour en savoir plus sur ce maître du surréalisme, allez sur : http://www.salvador-dali.org/fr_index.html) et le quitte. Il publie un recueil, Capitale de la douleur pour évoquer l'amour et les souffrances vécues avec Gala.

 

L'amoureuse

Elle est debout sur mes paupières
Et ses cheveux sont dans les miens,
Elle a la forme de mes mains,
Elle a la couleur de mes yeux,
Elle s'engloutit dans mon ombre
Comme une pierre sur le ciel.

 

Elle a toujours les yeux ouverts
Et ne me laisse pas dormir.
Ses rêves en pleine lumière
Font s'évaporer les soleils,
Me font rire, pleurer et rire,Parler sans avoir rien à dire.

                       (Mourir de ne pas mourir, 1924)

 

La version chantée de Jérôme Minières ; celle de Yves Montand ; je vous invite à aller voir sur des sites de vidéos en ligne pour vous rendre compte que ces poèmes touchent toujours beaucoup de personnes.

La courbe de tes yeux

 

La courbe de tes yeux fait le tour de mon coeur,

Un rond de danse et de douceur,

Auréole du temps, berceau nocturne et sûr,

Et si je ne sais plus tout ce que j'ai vécu

C'est que tes yeux ne m'ont pas toujours vu.

 

Feuilles de jour et mousse de rosée,

Roseaux du vent, sourires parfumés,

Ailes couvrant le monde de lumière,

Bateaux chargés du ciel et de la mer,

Chasseurs des bruits et sources des couleurs,

 

Parfums éclos d'une couvée d'aurores

Qui gît toujours sur la paille des astres,

Comme le jour dépend de l'innocence

Le monde entier dépend de tes yeux purs

Et tout mon sang coule dans leurs regards.

                                                                          (Capitale de la douleur, 1926)

Récité par Gérard Desarthe

 

Paul Eluard se marie ensuite avec celle qu'il nommera Nusch et qui meurt brutalement en 1946 ; il publie alors le court recueil Le temps déborde pour crier sa souffrance.

Eluard_texte_manuscrit

Vingt-huit novembre mil neuf cent quarante-six

Nous ne vieillirons pas ensemble.
Voici le jour

En trop : le temps déborde.

Mon amour si léger prend le poids d’un supplice.

 

 

Ma morte vivante

Dans mon chagrin rien n'est en mouvement
J'attends personne ne viendra
Ni de jour ni de nuit
Ni jamais plus de ce qui fut moi-même

Mes yeux se sont séparés de tes yeux
Ils perdent leur confiance ils perdent leur lumière
Ma bouche s'est séparée de ta bouche
Ma bouche s'est séparée du plaisir
Et du sens de l'amour et du sens de la vie
Mes mains se sont séparées de tes mains
Mes mains laissent tout échapper
Mes pieds se sont séparés de tes pieds
Ils n'avanceront plus il n'y a plus de routes
Ils ne connaîtront plus mon poids ni le repos

Il m'est donné de voir ma vie finir
Avec la tienne
Ma vie en ton pouvoir
Que j'ai crue infinie

Et l'avenir mon seul espoir c'est mon tombeau
Pareil en tien cerné d'un monde indifférent

J'étais si près de toi que j'ai froid près des autres.
 

 

 

Pour plus d'informations sur Paul Eluard, http://www.paul-eluard.com/

Pour entendre d'autres poèmes d'Eluard, dont Couvre-feu dit par Gérard Philippe 

 

Louis Aragon (1897-1982) : Il n'y a pas d'amour heureux (La Diane française, 1944)

Rien n'est jamais acquis à l'homme Ni sa force

Ni sa faiblesse ni son coeur Et quand il croit
Ouvrir ses bras son ombre est celle d'une croix
Et quand il croit serrer son bonheur il le broie
Sa vie est un étrange et douloureux divorce
Il n'y a pas d'amour heureux

Sa vie Elle ressemble à ces soldats sans armes
Qu'on avait habillés pour un autre destin
À quoi peut leur servir de se lever matin
Eux qu'on retrouve au soir désoeuvrés incertains
Dites ces mots Ma vie Et retenez vos larmes
Il n'y a pas d'amour heureux

Mon bel amour mon cher amour ma déchirure
Je te porte dans moi comme un oiseau blessé
Et ceux-là sans savoir nous regardent passer
Répétant après moi les mots que j'ai tressés
Et qui pour tes grands yeux tout aussitôt moururent
Il n'y a pas d'amour heureux

Le temps d'apprendre à vivre il est déjà trop tard
Que pleurent dans la nuit nos coeurs à l'unisson
Ce qu'il faut de malheur pour la moindre chanson
Ce qu'il faut de regrets pour payer un frisson
Ce qu'il faut de sanglots pour un air de guitare
Il n'y a pas d'amour heureux.

 

Publié dans Français

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